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Le télétravail : piège ou progrès

Je reprends le titre de l'émission d'Europe1 hier soir à 18h. Xavier de Mazenod qui anime le projet Zevillage y était invité. Ayant adhéré récemment à cette association, j'en profite pour faire part de mon expérience de ce type d'organisation.

Comment ça se passe ?

Je participe à un programme, encourageant ceux qui le souhaitent, à effectuer tout ou partie de leur travail à domicile. L'équipement nécessaire est fourni par mon employeur. Il s'agit du poste de travail (PC portable) et du téléphone portable. La connexion ADSL est remboursée forfaitairement à 20 Euros par mois. La connexion au réseau se fait par authentification sur TokenCard, avec calcul d'une même clé sur le serveur et sur la TokenCard. A partir de ce moment là, je suis sur le réseau de mon entreprise, de la même manière que si je suis au bureau. Tout travail de recherche ou de rédaction de document commercial ou technique peut ainsi être effectué à la maison.

Conditions pour que ça puisse marcher

Il faut que le travail soit basé sur des réalisations et des objectifs, pas sur une présence horaire. Cela suppose que je ne compte pas mes heures, et mon employeur non plus. Une confiance mutuelle s'établit très vite si les deux parties sont de bonne foi. Les horaires sont donc flexibles, à condition d'être joignable par téléphone ou par E-Mail aux heures ordinaires de bureau.

Les avantages du travail à la maison

Le premeir avantage et le plus visible est évidemment dans le gain de temps. Une journée de travail dans une grande ville peut durer 12h, avec les 8h à l'entreprise + 1 h de pause déjeuner, et parfois près de 3h de transport. A la maison, le temps et la fatigue du transport sont supprimés. En ce qui me concerne, je peux également découper ma journée de travail différemment. Par exemple, en commençant le matin à la maison par le tri des mails, quelques tâches administratives. Cela me permet de partir plus tard, après les bouchons du matin, tout en ayant déjà effectué une partie de travail à la maison.

Pour l'employeur, on comprend facilement les économies qui peuvent être faites, en étant assuré qu'une fraction importante de son effectif n'occupera pas sa place de bureau tous les jours.

Les objections

L'entreprise est un lieu de travail, mais c'est aussi un lien social. Celui-ci serait rompu si l'on généralise ce type de pratique. C'est aussi une crainte des syndicats qui verrait leur influence s'effriter encore plus. On peut répondre à cela que le télétravail est rarement exclusif, et qu'il n'empêche pas de se rendre régulièrement dans son entreprise, même si ce n'est plus quotidiennement.

On peut aussi objecter que les économies faites par l'entreprise sont un gain net, sans que l'employé en tire bénéfice pour lui-même. C'est là où les accords d'entreprise doivent être négociés, afin que chacun puisse évaluer les gains et les charges d'un tel système, pour l'entreprise comme pour le salarié. Tout ceci est assez facilement négociable. La difficulté réside sans doute plus dans la crainte des entreprises comme des employés devant cette nouvelle manière d'organiser le travail.

Que l'on me permette un souvenir personnel. Il y a deux types de cadres : ceux qui se sentent dévalorisés s'ils terminent avant 21h, et s'ils ne ramènent pas de travail le soir ou pour le week-end ; et puis il y a ceux qui se sont jurés de ne jamais ramener de travail à la maison, et de bien cloisonner ces deux mondes.

J'ai longtemps fait partie de cette deuxième catégorie. En cas de forte charge de travail, je préférais rester tard au bureau pour rentrer au milieu de la nuit à la maison. Il ne vous reste plus qu'à réchauffer les restes du dîner au micro-ondes, quand tout le monde dort. Vous avez alors le temps de penser qu'il serait peut-être plus intelligent de rentrer plus tôt, pour pouvoir dîner en famille, et reprendre le travail après, quitte à rompre avec votre serment de cloisonnement. C'est ainsi que petit à petit, on en vient à accepter cette "intrusion" du monde professionnel dans l'intimité famililale.

Un retour à une certaine tradition

Si l'on porte le regard un peu plus loin, on s'aperçoit que ce type de travail ne fait que renouer avec un mode ancien d'organisation de la vie. Pendant des siècles, les agriculteurs, comme les artisans ou les commerçants ont résidé sur leur lieu de travail. Des générations d'enfants ont ainsi été formés à leur futur métier, par un contact quotidien avec la pratique de leur parents. Il est évident  que nous ne somme plus à l'époque où les enfants avaient forcément la même activité professionnelle que leurs parents. Pour autant il y a bien des avantages à ce que l'enfant puisse se rendre compte concrètement de ce que représente le travail d'un adulte. Plutôt qu'un départ tôt le matin quand les enfants dorment encore, un retour le soir quand ils dorment déjà; plutôt qu'une absence quotidienne dans un bureau mystérieux, une présence même épisodique des parents leurs permet de les voir pendant la semaine, et pas seulement le week-end. Ils peuvent les voir aussi au travail tout comme les ont toujours vu leurs prédécesseurs, pas si lointains que celà. Finalement, cette organisation en usine, en atelier ou en bureau n'aura peut-être été qu'une parenthèse de deux siècles dans la vie de travail de l'homme. Le bilan qu'on peut en faire n'est pas spécialement positif et le télétravail n'est par certains côtés qu'un retour à un mode de vie tout à fait traditionnel. 

 

Le télétravail n'est malheureusement pas possible pour tous ceux qui le souhaiteraient. Les emplois de service, dans un site d'accueil de la clientèle (administrations, grandes surfaces, banques, etc.) ne sont pas candidats. On comprend aussi que la plupart des travaux de production qui nécessitent un outillage lourd, et la présence d'une équipe de travailleurs ne peuvent pas se faire à la maison. En plus, ce sont déjà ces emplois mal payés qui sont les plus susceptibles d'être délocalisés.

Il y a évidemment à repenser de manière beaucoup plus large les nouvelles conditions de travail qui sont maintenant possibles et parfois souhaitables. A une extrémité, on trouve certains cadres qui peuvent organiser assez librement leurs  horaires et leurs lieux de travail. A l'autre extrémité, beaucoup d'employés et d'ouvriers sont contraints à des longs déplacements vers un lieu de travail fixe, pour un travail pénible et menacés par la concurrence des pays à bas salaire. Nous ne sommes décidément plus au temps d'une réglementation du travail monolithique et rigide.

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